Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
krèk krèk
2 mars 2007

happax et rock n'roll

333                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                              

« Mademoiselle Albertine est partie » ! Comme la souffrance va plus loin en psychologie que la psychologie ! Il y a un instant, en train de m’analyser, j’avais cru que cette séparation sans s’être revus était justement ce que je désirais, et comparant la médiocrité des plaisirs que me donnait Albertine à la richesse des désirs qu’elle me privait de réaliser, je m’étais trouvé subtil, j’avais conclu que je ne voulais plus la voir, que je ne l’aimais plus. Mais ces mots : « Mademoiselle Albertine est partie » venaient de produire dans mon cœur une souffrance telle que je ne pourrais résister plus longtemps. Ainsi ce que j’avais cru n’être rien pour moi, c’était toute ma vie. Comme on s’ignore.

Marcel Proust

                            

[ index : le jeune homme, disloqué, comme devenu autre, un autre : «  Après avoir baisé à l’Ananas Bar, je suis allé me faire un döner à côté. J’aurais pu la tuer, lui vomir sur sa tronche de putain, merde !

« Putain, j’y étais presque, à quelques pas du rendez-vous, je me délectais, je me préparais, je me tenais, putain, il vibre dans ma poche, un message : je ne pourrais pas venir, je tombe, m’accroche à la table, commande à boire, je suis navrée, la réunion dure plus longtemps que prévue, j’envoie le livre à travers le bar, insulte la serveuse. Je me calme, putain, un coup pareil, à deux pas du rendez-vous, poser un lapin, je n’y crois pas, elle ne voulait pas me voir, je le sais, une invention, depuis le début, un café, un café, j’envoie le livre, lui réponds : Bonne journée, j’y ai mis tout le cynisme possible, elle me réponde : merci, je crève, je sors, je rampe dans la rue, je fixe les gens ou le sol sans émotion, je suis devenu une pierre, un bloc, je me dis, seul, putain, seul jusqu’au bout, jusqu’au bout se faire des prières incantatoires.

« Lui écrire : En espérant te revoir, en espérant quoi, merde quoi, qu’espérer, elle, toi, revoir, voir re, une vitre dans la gueule, en espérant, monsieur fait des politesses, monsieur des révérences, encore une couche, alors que je voudrais lui dire que je voudrais encore une fois son corps, son cul sur le mien, ses seins dans ma bouche, sa gueule ouverte et la mienne, son cou contre mes dents, son corps contre le mien, une nuit encore, un peu moins bourré, ma bite dans son sexe, le sien éventrant le mien, je sens ta chevelure caresser le torse, merde putain… »]

Le jeune homme : « Crois-tu, mélane, que je suis celui que par toi je critique ? »

Une image engendre possiblement d’autres images. « L’action a des conséquences. » La scène se développe, n’est-ce pas.

- Crois-tu, mélane, que je suis celui que par toi je renie ?

Mélane, comment es-tu, regarde venir polan. Elle est assis sur une souche. Au bord, à la limite, les mottes du labour sont sèches et craquelées.

- Monde cassé, monde bouleversé. Les autres sont des lieux d’objectivation. J’objective dans l’autre. Je superpose des images. Mélane, je me renie en toi, je crois, tu es une idée que j’ai forgée, non, une idée qui m’est venue.

Monde cassé, à coup de marteau, conscience malheureuse, à coup de marteau.

Double visage de la guerre, sujet objet.

- Je ne suis pas sûr que tu sois même une idée. Un nom, le rassemblement de quelques lettres.

Polan, naturel, approche. Il marche dans le champ.

- Crois-tu…

mélane prend polan dans ses bras. Elle l’embrasse. Le jeune homme sort de scène. Dans les coulisses, il fait sombre. C’est un dédale, dans lequel il a de la peine à se retrouver. Tout semble tourner autour de lui.

« J’ai fait le vide. », se rappelle-t-il. Il touche son ventre, il se prend de vertige.

- Que suis-je en train de faire…oui…il ne faut pas oublier…reconstruire une image…ressemblante…identique ?…des images…dans le ventre…je n’ai pas oublié…

*

« chercheur d’or…Amérique du Sud….à force de tamis…coup de poignard…paillettes d’or…l’or rassemble…l’or tue…disparaître…laisser la scène à polan et mélane…fais assez de mal…la tempête…je n’arrive pas à la garder en moi…disparaître…cela signifie partire…laisser une place…en trouver une autre ailleurs…chercheur d’or…la machette à la taille…j’aime mélane…polan n’en sait rien…peut-être qu’il sait…ne me dit rien…partir et tenir le secret…mélane…une image…pardon mélane…je n’ai pas su dessiner ton visage…je n’ai pas su te rejoindre…quelle porte pour le champ…au dédale…polan…cela fait longtemps qu’il traîne…le laisser aller…ne pas l’interdire…m’effacer…quitter la scène…marcher…chercheur d’or…coup de poignard…

« J’ai vu qu’ils s’embrassaient…ils s’embrassaient en moi…rien pu tenir…une image…une histoire bien plus ancienne…elle s’appelait Barbara…très faible image…une banquise…le grand crabe du Nord…elle est vêtue d’une robe rouge…moulante en soie…un châle…flotte dans l’air…avec ses bras…elle forme des arabesques…les pinces du crabe fendent l’espace…et produisent un sifflement…les tambours mexicains…

«…s’en aller…l’image du baluchon…une jambe de bois…cahin-caha…trébucher…casser le monde…le bouleverser…à coup de marteau… »

Polan rejoint mélane. Son ventre grossit. L’enfant finira pas venir. Elle l’embrasse, polan lui prend la main, l’amène sur le chemin. Ils s’en vont ailleurs. Ils sortent de l’image.

La scène est trop restreinte : toute scène est trop restreinte. La scène est artificielle, l’espace dirigé. Elle risque à tout instant de basculer dans le vide. On ne casse pas le monde avec une scène, on ne s’en distancie même pas. La scène engendre de façon mimétique, les mondes. Pas assez dur, pas assez radical.

La scène est une image.

Polan et mélane prirent la rue des Pavillons.


*

Publicité
Publicité
Commentaires
krèk krèk
Publicité
Derniers commentaires
Publicité